vendredi 8 mars 2013

INITIATEURS DE FEU

INITIATEURS DE FEU

Ce terme générique désigne tout élément susceptible d'être transformé en braise à la suite d'un contact avec une étincelle suffisamment chaude. Nous avons vu lors de notre précédent billet que la marcassite et le silex, frappés l'un contre l'autre, permettent d'obtenir des étincelles de qualités, issue de la marcassite. Cette technique par percussion est la plus vieille du monde. Les plus anciennes marcassites trouvés dans des campements préhistoriques sont datées de 20 000 ans et des poussières. Mais gageons que cette pierre fut utilisée depuis bien plus longtemps encore. En effet, la marcassite est un sulfure de fer. A ce titre, elle à une forte tendance à rouiller et à se transformer en poudre, difficilement détectable sous la truelle et l’œil pourtant avertis de l'archéologue. 
Mais ces étincelles ont besoin d'être recueillies sur un élément suffisamment inflammable pour se transformer en braise. Quel initiateur de feu à donc pu utiliser notre ancêtre? La nature propose plusieurs éléments inflammables. Nous en pratiquons deux régulièrement, l'amadou issus de l'amadouvier et la massette de roseaux. L'amadou est de loin le plus efficace.
Massettes de roseau en graine. Parc du Château de Versailles (Photo Christophe Sence)
Colonie d'amadouviers sur un hêtre (photo Christophe Sence)
L'amadouvier (Fomes fomentarius) est un champignon de la famille des polypores. IL pousse sur les arbres malades. Ces cibles favorites sont les peupliers et les hêtres. Découpé en tranche, il est un excellent initiateur de feu. D'ailleurs, certain sites lacustres datés de la fin de la préhistoire (Néolithique) ont livré quelques exemplaires de ce champignon confirmant son usage précoce comme initiateur de feu.
Il est le complément idéal du briquet à marcassite. Il peut-être utilisé brut car le souffre naturellement contenu dans la marcassite aidera à la combustion. Inutile donc de lui faire subir un quelconque traitement. En revanche, utilisé avec un briquet en fer, il est nécessaire de faire subir un traitement au champignon. Par exemple un bain de salpêtre.

Mais ce champignon possède d'autres vertus que celles de permettre la création d'une braise. Il fut utilisé en médecine, et notamment en chirurgie comme compresses. En effet, ces propriétés hémostatiques furent appréciés des chirurgiens jusqu'au XIX ème siècle avant que les compresses en coton, moins efficaces mais plus faciles à produire, remplacent définitivement les compresses en amadou.
L'amadouvier, et cela est encore bien moins connu, peut être travaillé en larges bandes que l'on peut ensuite utiliser comme du tissus. Actuellement, cet artisanat persiste en Roumanie, dans un petit village de Transylvanie appelé Korond. Seule six familles pratiquent encore ce travail. Le métier est au bord de l'extinction. Depuis la chute du communisme, la dé-collectivisation des terres à entrainé une gestion plus rigoureuse des parcellaires forestiers. La volonté de rentabilité n'est plus compatible avec la prolifération d'arbres morts, pourtant essentiel au développement de l'amadouvier. A terme, la matière première risque donc de manquer, et la production de s'arrêter.
De nos jours, ce champignon sombre peu à peu dans l'oubli, rejeté au rang de simple parasite.

Pour plus d'information sur le travail artisanal de l'amadouvier en Roumanie, voici un court-métrage de 26 minutes réalisé en août 2012 par Gwendoline Torterat, ethnologue :



Visitez également son blog : Koramad
http://koramad.blogspot.fr/2012/08/blog-post_20.html

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire